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Arnaud MOUILLARD, Educateur spécialisé. Blogueur membre des #LeftBlogs

Heures supplémentaires défiscalisées : quels risques ?

Article de Aimé Fay sur AgoraVox


Avec sa mesure sur les heures supplémentaires défiscalisées le futur gouvernement risque d’être confronté à plusieurs écueils de taille. D’une part, favoriser l’emploi dans les pays étrangers et d’autre part, déclencher une baisse de la production en France, avec toutes ses conséquences négatives sur l’emploi et les revenus. Exactement l’effet contraire à celui recherché !

Mais tout d’abord, il convient de dire que ce n’est pas la loi qui crée les heures supplémentaires. Pour une entreprise, les heures supplémentaires n’ont rien d’un phénomène de génération spontanée comme le laisse croire depuis quelques mois le projet du Président Sarkozy.

 

En effet, c’est l’augmentation de la demande, c’est-à-dire la croissance, anticipée ou non, du chiffre d’affaires des entreprises qui crée un besoin d’heures supplémentaires. Et, surtout pas l’inverse ! Pas non plus, naturellement, la volonté du salarié de travailler en heures sup sans l’accord express de son entreprise.

 

Le modèle du Président nouvellement élu, s’inspire, on le sait, d’un modèle libéral. Celui-ci énonce en l’espèce que :

 

Production = Revenu

 

Dans cette équation, il est supposé que l’équilibre "production-revenu" est réalisé a priori et que les revenus vont développer la production et donc l’emploi. En fait, ce modèle libéral édicté par Adam Smith au 18ème siècle - c’est quand même assez loin - est purement théorique. Dans la réalité économique, si l’équilibre est réalisé, celui-ci l’est a postériori et non surtout pas a priori !

 

Le futur gouvernement a établi ses prévisions sur le fait que les nouveaux revenus créés par les heures supplémentaires vont engendrer une croissance de la production et alimenter ainsi le triptyque vertueux "revenu-production-emploi". Cela suppose au moins deux choses ; que les nouveaux revenus ne soient pas épargnés et surtout que ces revenus aillent alimenter la demande de consommation de produits fabriqués par les industries implantées sur notre territoire. Dans le cas contraire, cela serait catastrophique. Les deux risques suivants sont explicites :

 

1er risque :

 

C’est celui de voir ce surcroît de revenus favoriser non pas les productions françaises mais celles importées de pays étrangers, car utilisé pour acheter des produits fabriqués à l’extérieur du territoire tels que : les écrans plats, les chaîne hi-fi, les équipements vidéos, les téléphones portables et autres vêtements et chaussures de basse et de moyenne gamme. Sans parler d’achats de voitures à bas prix fabriquées dans les pays de l’Est européen. Dans ce cas, l’argent du contribuable - par cadeau fiscal interposé fait aux salariés comme aux entreprises - serait utilisé pour favoriser la croissance de l’emploi dans d’autres pays. C’est sûrement bien pour eux, notamment pour les nouveaux pays de l’Union européenne, mais catastrophique pour l’économie de la France et tout à fait contraire à l’effet, sincèrement recherché, par le Président de la République !

 

2ème risque :

 

Toujours à supposer que les revenus des nouvelles heures supplémentaires soient fournis sans qu’il y ait au préalable une demande, c’est-à-dire une réelle augmentation du chiffre d’affaires des entreprises françaises, le deuxième risque encouru est d’affaiblir notre croissance. En effet, quand une entreprise demande à ses collaborateurs de travailler en heures supplémentaires c’est qu’elle va, de façon mécanique, mettre plus de produits sur le marché. Hors, si ses produits ne sont pas achetés, car le consommateur porte sa demande plutôt sur des produits importés, l’entreprise va réagir de deux façons : soit baisser sa production et écouler ses stocks, soit diminuer ses prix. Dans les deux cas, il y a un risque probable de réajustement plus ou moins brutal de la masse salariale. Voire de licenciements !

 

Par ailleurs, dans les risques énumérés ci-dessus, nous n’avons pas non plus tenu compte que l’Etat serait aussi perdant en termes de rentrées fiscales puisque que ces fameuses heures supplémentaires seront exonérées tant pour l’entreprise que pour le salarié. Nous n’avons pas non plus évoqué le fait qu’une entreprise aura désormais intérêt à remplacer toute augmentation de salaire par une enveloppe d’heures supplémentaires, totalement défiscalisées.

 

Voilà peut-être une nouvelle niche fiscale qui apparaît. Favorable tant aux entreprises qu’aux salariés, mais dont les effets sur la croissance et la création d’emplois risquent d’être déplorables.

 

Le projet du Président doit donc être rapidement repensé sous peine d’un éventuel échec. Confronté à la réalité de gouverner, il n’est pas impensable de revenir sur une mesure prise en période d’élection. Période durant laquelle les électrices et les électeurs veulent entendre des promesses, tout en sachant quelles ne doivent pas obligatoirement être mises en œuvre ... comme le passé l’a toujours démontré.

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