La scène se passe à Clichy-sous-Bois. Une voiture de police est arrêtée en pleine rue. Autour, un groupe de jeunes plus ou moins menaçants. Les agents sortent du véhicule, Flash-Ball à la main. « Allez, cassez-vous ! » crie l’un d’eux en se dirigeant vers les jeunes qui détalent. Mais le policier ne s’arrête pas pour autant. Il court sur une vingtaine de mètres après l’un, après l’autre. Il tire. Une fois, deux fois, trois fois. Sans raison. Personne ne le menace. Depuis la fenêtre de son immeuble, l’auteur de la vidéo lâche un commentaire : « Il est chaud, lui ! »
Mis en ligne sur Internet, ce petit film pris depuis un téléphone portable fait partie des nombreux documents qui circulent autour des violences urbaines de ces dernières semaines. Des documents, pour certains, accablants pour les forces de l’ordre dont l’attitude, parfois, semble s’éloigner singulièrement de la déontologie en vigueur chez les « gardiens de la paix ».
La palme revient sans conteste à un cameraman de TF1 qui a filmé un contrôle d’identité sulfureux entre un groupe de policiers et des jeunes Lyonnais équipés de discrets micros. L’un des gamins proteste. Un policier le coupe par un « ta gueule ! » « Vous nous dites "ta gueule" et on a rien fait, m’sieur », réplique le jeune. Réponse très fine du policier : « Tu veux que je t’emmène dans un transformateur ? » À un autre enfant qui se moquait de son crâne rasé, un policier répond : « Tu veux griller toi aussi avec tes copains ? Tu veux aller dans un transfo ? Ramène ta gueule, on va t’en mettre. » Faussement naïf, le premier jeune relève : « Si c’est comme ça, vous croyez que tout le quartier il va se calmer ? » Réponse d’un des flics : « Que le quartier se calme ou pas, on s’en branle. Nous, à la limite, plus ça merde, plus on est contents ! »
Deux documentaires de Canal Plus, diffusés mardi prochain dans le cadre de l’émission 90 Minutes, sont tout autant explicites. Le premier tend à démontrer la responsabilité de la police dans le gazage de la mosquée de Clichy. Une affaire qui a enflammé les cités et autour de laquelle le ministère de l’Intérieur entretient le plus grand flou. Le second filme une confrontation entre des bandes de jeunes de Vaulx-en-Velin et la BAC de Lyon, dont l’intervention en dit long sur l’absence de « dialogue » entre la police et la population.
Pour une institution habituée à l’esprit de corps, ces vidéos constituent de véritables épines. L’un de ces films, diffusé par France 2, a même débouché sur la suspension, de huit policiers de Seine-Saint-Denis, coupables d’avoir portés des « coups illégitimes » à un jeune homme de La Courneuve. Reste une question : que ce serait-il passé sans ces images ?
Vidéo sur : http://media.putfile.com/clichy
D'après : http://www.humanite.fr/journal/2005-11-12/2005-11-12-817719