D'après l'article de Mairice Ulrich paru dans l'Humanité
En déclarant à son arrivée en Afrique que l’usage du préservatif aggraverait la pandémie du Sida, le pape renoue avec les pires heures de l’église et un obscurantisme faisant bon marché de la vie des Africains.
Selon Benoît XVI, non seulement le préservatif n'est pas efficace contre le sida, mais il aggrave la situation.
« Consternation », pour la ministre belge de la Santé aussitôt à la suite des propos du pape sur l’usage du préservatif pour la prévention du sida à son arrivée en Afrique.
Pendant que l’on attendait encore, vingt-quatre heures après, les réactions de Roselyne Bachelot, ceux de son homologue Laurette Onkelinx condamnent cette « stupéfiante » déclaration sans appel qui pourrait « anéantir des années de prévention et de sensibilisation et mettre en danger de nombreuses vies humaines ».
Pour Rebecca Hodes de la Campagne pour le traitement en Afrique du Sud, cela signifie que « le dogme religieux est plus important que la vie des Africains ».
Pour Marie-George Buffet, présidente du Groupe d’études sida à l’Assemblée, ces déclarations « irresponsables et criminelles » sont « insupportables ». Les réactions se sont multipliées hier dans le monde et en France, dont celle d’Alain Juppé, « ce pape commence à poser problème ». Les Affaires étrangères ont exprimé de « vives inquiétudes ».
En arrivant dans un continent où 22 millions de personnes sont atteintes, heurtant de front la pratique même des associations engagées dans la prévention sur le terrain, Benoît XVI vient de plus de renouer avec les pires heures de l’histoire de l’Église. Car il ne s’agit plus pour lui de condamner, en se couvrant du respect de la vie et de la procréation, l’usage du préservatif. Il s’agit d’asséner, face à tout un continent et au monde le dogme contre la science comme il le fut contre Galilée ou comme il l’est contre Darwin pour certains milieux ultra-conservateurs aux États-Unis.
Cette nouvelle sortie devrait encore approfondir le trouble dans l’église catholique et dans le monde, urbi et orbi, et que soulignaient à leur manière les plus grands quotidiens italiens voici quelques jours en titrant sur « la solitude du pape ». Dernière affaire avant celle-ci, celle de l’excommunication au Brésil de la mère d’une fillette de neuf ans ayant avorté de jumeaux à la suite d’un viol, prononcée par l’archevêque de Recife.
La conférence nationale des évêques du Brésil l’a désavoué la semaine passée, prenant ainsi ses distances avec le Vatican même qui avait justifié cette excommunication et celle de tout le corps médical concerné.
Levée d’excommunication en revanche pour les évêques intégristes dont le négationniste Richard Williamson.
Avec cette incroyable déclaration sur le sida, Benoît XVI vient de franchir un nouveau cap. Jusqu’où et à quelles fins ?