Article de Kahm Piankhy sur Le privilège des jonquilles, le dernier livre de Pascal Sevran
Je me suis donc perdu dans « Le privilège des jonquilles » afin de voir dans quel contexte est évoqué la question de la natalité et de la famine au Niger. La phrase « la bite des Noirs est responsable de la famine en Afrique » n’y est pas. C’est simple ! Pourtant, France Soir l’a mise entre guillemets. Or l’utilisation des guillemets (’’…’’) et des chevrons (« … » ) traduit la reprise d’une citation exacte. Par conséquent, que Var Matin pense que Pascal Sevran considère que la bite des Noirs est responsable de la famine en Afrique est une chose. Mais mettre entre guillemets cette phrase, en prétendant que c’est une citation tirée du livre, est un procédé malhonnête.
Voici la page 214 mot pour mot :
« Des tombereaux d’enfants morts de faim, de soif, desséchés au soleil, des enfants ou ce qu’il en reste : quelques os oubliés des vautours que des tracteurs et des bennes à ordures enseveliront sous le sable en feu. Le Niger. Safari-photo insoutenable. Des enfants on en ramasse à la pelle dans ce pays (est-ce un pays ou un cimetière ?) où le taux de fécondité des femmes est le plus élevé au monde. Neuf enfants en moyenne par couple. Un carnage.
Les coupables sont facilement identifiables, ils signent leurs crimes en copulant à tout-va. La mort est au bout de leur bite. Ils peuvent continuer puisque ça les amuse. Personne jamais n’osera leur reprocher cela, qui est aussi un crime contre l’humanité : faire des enfants, le seul crime impuni. On enverra même de l’argent pour qu’ils puissent continuer à répandre, à semer la mort. Nous devrions avoir honte de nos larmes de crocodile sur les cadavres de ces anges noirs qui régalent les mouches ».
Le contexte dans lequel Pascal Sevran s’exprime est assez « particulier ». Ce journal intime exprime toutes les détestations, les joies, les peines du diariste qui le tient. C’est le principe fondamental d’un journal intime. Pascal Sevran revient plusieurs fois sur la question des enfants et du sur-peuplement de la planète dans cet ouvrage. Par exemple, il trouve de la sympathie à l’ancien ministre de l’économie et des finances, Hervé Gaymard, mais condamne cependant le fait qu’il soit le père de huit enfants. Après que le Canard Enchaîné ait révélé qu’il louait un somptueux duplex dont le loyer de 14.000 euros par mois était à la charge de l’État, Hervé Gaymard proposa sa démission. Pascal Sevran affirme ne pas être choqué par cette affaire, demande de quoi se mêle le Canard Enchaîné et poursuit :
« Ce qui me choque, en revanche, ce sont les huit enfants du ministre. Je ne leur veux aucun mal, aux chers bambins, ils sont là maintenant, mais vraiment leur papa n’a pas été raisonnable. Il donne un très mauvais exemple aux couples inconséquents qui logent dans trente mètre carrés et se distraient à faire des bébés qu’ils auront du mal à élever (…) » p. 50-51
Lorsque l’on demande des explications à l’animateur de France 2 sur ses divagations au sujet de la sexualité des Nigériens qui portent la mort au bout de leur bite voici ce qu’il répond au journaliste de Var Matin :
« Dans Le privilège des jonquilles vous affirme que "la bite des Noirs est responsable de la famine en Afrique"...
Et alors ? C’est la vérité ! L’Afrique crève de tous les enfants qui y naissent sans que leurs parents aient les moyens de les nourrir. Je ne suis pas le seul à le dire (…) J’écris ce que je pense. Si des gens bien au chaud dans leurs certitudes ne supportent pas d’entendre ça, eh bien que les choses soient claires, je les emmerde… Oui, il faudrait stériliser la moitié de la planète »
Est-ce que Pascal Sevran fait appel à un stéréotype racial pour désigner la sexualité débridée de Nigériens qui se trouvent être noirs ? La réponse semble positive. Ramener le problème de la surnatalité à la bite des Nigériens est totalement absurde et laisse entendre que les Nigériens pensent avec leur sexe, comme des animaux. Quant à évoquer une stérilisation de la moitié de la planète, c’est carrément le propre d’une pensée fasciste.
Sevran a un gros problème avec l’Afrique et les Africains et il ne doit pas se cacher derrière son petit doigt :
« L’écœurante démagogie sur la tête des enfants, le chantage aux bébés que nous tendent à bout de bras en guise de bouclier leurs pères fous, ces images de désespoir boulevard Vincent Auriol, rue de la Tombe-Issoire. Ailleurs, partout où l’on voudra. On ne sait plus très bien où. Dans tous les taudis du monde les mêmes drames annoncés, des anges noirs, si beaux, si tristes. Des anges noirs par millions qui vont mourir. Sur l’inimaginable légèreté des Africains on ne peut rien dire sans risquer le banc d’infamie, la prison à vie pour incitation à la haine raciale. La haine, elle traîne plutôt dans les stades, sur les lèvres pleines de bière des supporters blancs comme la mort. M’obsède le sort des enfants de toutes les couleurs et je veux pouvoir le dire.
Par chance ce matin, Leonara Miano, jeune femme camerounaise qui vit en France, ne s’embarrasse pas de circonlocutions pour ’’dénoncer la barbarie’’ dans les colonnes du Nouvel Observateur (…) ». p. 258
Puis là, s’ensuit une longue suite de clichés délirants ou la très compétente leonara Miano - forcément, elle est camerounaise elle sait donc de quoi elle parle, ses affirmations ne font pas débat et sont acceptées comme vérité irrécusable puisque sortant de la bouche d’une Camerounaise : la bêtise des racistes c’est de croire que ce qu’ils pensent est d’autant plus vrai lorsqu’ils trouvent des alibis pour appuyer leurs préjugés raciaux - vient au secours de Pascal Sevran. Elle lie le fait d’envoyer des enfants faire la guerre, pendant qu’on leur fait « croire que, s’ils mangent le cœur de leur ennemi, ils seront à l’épreuve des balles », non pas à une corruption d’une situation qui s’explique par une anomie généralisée, mais au naturel des Africains.
Et c’est bien entendu ce qui arrange Pascal Sevran : Une Africaine qui dit ce qu’il a envie d’entendre et qui couvre ses propres préjugés raciaux derrière ses dires.
Oui mais on ne connaît aucun Africain pris au sérieux affirmant que les petits chefs fascistes des milices religieuses qui découpent les seins des femmes ou les bandes de pseudo-rebelles tarés qui prennent comme prétexte la défense d’une cause pour couvrir des activités purement criminelles sont des anges ayant les mains propres. Qu’est-ce que c’est que cette manie d’enfoncer des portes ouvertes et de se proclamer « diseur de vérité » ? Et quel rapport existe-t-il entre cela et la « légèreté des Africains » ? Lorsque l’on découvre que tout un quartier d’Angers utilisait, comme monnaie d’échange pour leur troc, des enfants du coin que des parents sodomisaient à tour de rôle en se refilant les bons plans, il ne viendrait à personne de caractériser ces dérives comme étant dans l’ordre des choses voulues par l’inné français et de les présenter comme quelque chose d’indépassable pour leur nature...
En outre, l’ouvrage revient sur plusieurs dîners avec ses amis Fogiel, Claude Berri, Jack Lang, Damien Thévenot de France 2 ou encore Stéphane Bern. Et là, on comprend pourquoi lorsque Guy Carlier, sur France Inter, taillait prestement Pascal Sevran pour son amour des jeunes minets, Stéphane Bern et Damien Thévenot - que Pascal Sevran nomme « l’ange blond des matins de France 2 » - étaient les premiers à protester.
Sevran évoque constamment, mais sans étalage ni précision chirurgicale, ses parties de jambes en l’air avec des éphèbes qui, quand ce ne sont pas de jeunes professeurs de gym brésiliens, sont des « adolescents » français fascinés par le personnage. Le terme « adolescent » est employé à plusieurs reprises par Pascal Sevran au sujet, notamment, d’un de ses amants totalement immature nommé « Julien », tout juste majeur, dont Marc-Olivier Fogiel lui demanda, par ailleurs, des nouvelles.
Le jeune Jeremy de la star Academy 5 - qui a participé à son émission Entrée d’artistes - lui écrit d’ailleurs une lettre que l’on comprend être une lettre d’amour puisqu’il la commente en ces termes : « Jeremy pense à moi. Il est même un peu plus précis (…) ».
Jeremy écrit donc :
« Je viens d’avoir dix-neuf ans, mais qui peut promettre que je serai centenaire ? Alors, je veux profiter des êtres que j’aime, dans mes moments de solitude, c’est à vous que je pense » p. 246
Continuons. Pascal Sevran célèbre le courage de Gabriel Matzneff, cet écrivain français maudit par toute la société pour le caractère malsain de ses livres dans lesquels il narre ses relations avec de jeunes garçons et filles mineurs. Dans son roman « Les moins de 16 ans », Matzneff dépeint la jouissance de coucher avec un enfant de douze ans et se pose en avocat de la liberté de jouir sans entrave.
Lisons ce que Pascal Sevran en dit :
« Paris 6 janvier
Les moins de 16 ans. Ce brûlot, paru il y a trente ans quand il était encore possible de dire la vérité, d’écrire sans trembler les choses de l’amour et du sexe, je ne l’avais pas lu. On vient de le rééditer, je l’ai lu la nuit dernière. Si je n’ai pas de goût pour les moins de seize ans, le style de Matzneff met en appétit » p. 28
Plus loin, il banalise la pédophilie d’André Gide qui, en Tunisie, se retrouvait avec des « enfants sur ces genoux, ces petits marchands de pistache » que Pascal Sevran, le nostalgique, envie. Voilà ce qu’il écrivait dans son journal intime précédent :
« Ah, l’heureux temps où Gide pouvait se vanter dans son journal de ses cabrioles tunisiennes sans craindre les ligues de vertu et autre professeurs de morale ! Ce que personne n’osa jamais reprocher à Gide. (…) ferait traîner en place publique, voire en cour d’assises, le premier qui entreprendrait aujourd’hui de rapporter par le menu ses ébats singuliers et charmants à Sidi Bou-Saïd ou ailleurs ».
Lorsque le journaliste belge qui l’interviewe lui demande de réagir à ses passages, Pascal Sevran les maintient avec délectation. Dans « Le privilège des jonquilles », il revient sur cette affaire en affirmant que les petits Tunisiens « savaient très bien ce qu’ils faisaient » :
« Le journaliste du Soir de Bruxelles a les yeux bleu pâle. Ça l’intéresse, ces petites affaires de Tunisiens. Il pense lui aussi, et cela l’amuse, qu’ils étaient très dégourdis les petits Tunisiens. Gide d’ailleurs s’en émerveillait, ne nous privant d’aucun détail dans son journal. Pourquoi devrais-je me scandaliser un siècle plus tard de ces jeux charmants de plaisirs partagés » p. 182-183
Plaisirs partagés avec des enfants ? En France, la loi nomme cela de la pédophilie...Mais il va encore plus loin dans la provocation :
« Et ça recommence ! Après « les nouvelles filières de la prostitution », voici « les ravages du tourisme sexuel ». Décidément, les grands reporters du Nouvel Observateur veulent nous gâcher les vacances. Si le tourisme n’était pas sexuel, ne fût-ce qu’en rêve, on se demande bien ce que nous irions faire dans ces contrées impossibles pleines de moustiques ? Les temples, les musées, les charmeurs de serpents, le sirtaki, ça va bien cinq minutes. Après quoi, il faut passer aux choses sérieuses. Assez d’hypocrisie ! (…). Les tour-opérateurs n’ont, hélas, pas de culture, ils proposeraient des forfaits André Gide, le tour serait joué. Avec la permission du Nouvel Observateur, de l’Église protestante, de l’amicale des anciens prix Nobel, nous partirions en voyage au Congo, à Manille, à Hong Kong, avec des bonbons plein les poches. Et en pèlerinage à Sidi Bou-Saïd, nous lirions Paludes à des garçons en djellaba ». p. 247-248
Nous retrouvons là une apologie, non seulement de la pédophilie mais doublée d’un éloge à la prostitution. Des « forfaits André Gide » au cours desquels ils auraient des « bonbons pleins les poches » constituent une métaphore visant explicitement les enfants à qui l’on pourrait offrir des sucreries contre une petite gâterie en tout bien tout honneur.
Après cette lecture, je ne suis pas sûr d’avoir envie de lire les deux tomes précédents que j’ai en ma possession. On verra si le cœur m’en dit mais trop de choses sont malsaines chez le personnage. Qu’il trouve que Tarik Ramadan « irrésistible » et d’une « infernale beauté » qui pourrait lui faire mener « les foules en djellaba là où il veut » est une chose. Mais que ses amis de la télé protègent un homme qui considère que les pays à moustiques ne sont intéressants que lorsqu’il s’agit d’aller visiter le colon de petits congolais, tunisiens ou philippins démontre qu’il y a vraiment quelque chose de pourri quelque part.
Kahm Piankhy
Source : www.Piankhy.com