Les militants d’Act Up-Paris et du 9ème collectif des Sans-Papiers ont collés en région parisienne une affiche présentant une photo de Nicolas Sarkozy avec pour slogan « Votez Le Pen ».
«L'affiche dit bien le fond de notre hargne contre Nicolas Sarkozy», explique Eric Labbé, porte-parole d'Act Up-Paris, qui cosigne la campagne avec le 9e collectif des sans-papiers. «C'est lui qui refuse des cartes de séjour pour les migrants malades du sida et donne des instructions aux préfets pour qu'ils soupçonnent les sans-papiers de frauder l'aide médicale d'Etat (AME). Sans parler de son discours, de plus en plus populiste. Alors que Le Pen est ultragâteux, Sarkozy embrasse une large partie des idées du FN et entraîne derrière lui beaucoup de députés UMP.» Téléchargeable sur le site d'Act Up (http://www.actupparis.org), cette affiche provocatrice a au moins le mérite de la clarté : la « lepénisation » des esprits est en marche, et Sarkozy en serait l'agent le plus efficace.
Cette campagne résume bien la colère qui monte parmi les associations et partis de gauche. Récemment, le président de la Ligue des droits de l'homme, Jean-Paul Dubois, est monté au créneau pour dénoncer la volonté de Sarkozy d'expulser «sans délai» les étrangers en situation régulière condamnés lors des violences en banlieue. Un coup de menton du ministre de l'Intérieur qui, pour l'instant, n'a pas été suivi d'effet.
«C'est une communication électoraliste en direction de l'extrême droite», a estimé Jean-Paul Dubois, sur France Inter, juste avant que le président de l’UMP ne réponde à ses détracteurs sur la même radio. «J'ai toujours combattu Jean-Marie Le Pen», a martelé Sarkozy, tout en dénonçant «les protestations et les manifestations» qui, selon lui, n'ont servi qu'à «mettre le FN au-delà de 20 % pendant vingt ans et Jean-Marie Le Pen au second tour de l'élection présidentielle». Le ministre de l’intérieur, entend quand à lui faire sauter «la chape de plomb qui empêche un débat serein et approfondi sur l'immigration». Et Sarkozy de conclure : «Qui ne voit l'exaspération qui monte ? Les Français demandent le retour d'un certain nombre de valeurs, l'autorité, le respect [...]. On devrait nous féliciter de faire revenir vers le camp républicain des gens qui avaient déserté !»
A gauche, nombre d'élus tiennent Sarkozy comme responsable. «Il y a une certaine forme de crapulerie politique à exploiter les thèmes de l'immigration, de l'insécurité, pour préempter les idées de Le Pen et les banaliser», a estimé Noël Mamère (Verts) après la parution du sondage. «Il y a maintenant un réel danger de voir l'extrême droite tirer les marrons du feu de l'emballement de la droite», a également expliqué Malek Boutih (PS), dans le Parisien Dimanche. «Les Français ne sont ni racistes ni d'extrême droite, mais c'est ce qui risque d'arriver si la droite continue de courir derrière le FN.» Pour les associations et partis de gauche, il reste à prouver que ce procès en lepénisation est d'une quelconque efficacité.
«L'équation Sarkozy = Le Pen sera sans effet sur la population. Les Français n'ont que faire de cette agitation politico-médiatique. Mais si cela peut montrer qu'on s'occupe réellement des sujets qui intéressent les Français, au final, c'est assez bon pour nous.» assurait hier un proche du président de l'UMP.
Dans la perspective des élections présidentielles de 2007, Nicolas Sarkozy a choisi de battre campagne contre l’immigration. Celui-ci faisait récemment passer les étrangèrs pour des fraudeurs et des délinquants, maintenant, il affirme que l’immigration irrégulière produit de « la haine » et est responsable des « violences urbaines que nous avons connues il y a quelques semaines », ou encore que le chômage serait imputable à « l’immigration subie qui pèse sur le marché du travail », paraphrasant ainsi le « 3 millions de chômeurs, 3 millions d’immigrés en trop » de Jean-Marie Le Pen.
Ces discours idéologiques, servent à légitimer une politique consistant à faire peur à la population, et ainsi faire de Nicolas Sarkozy le seul à pouvoir faire quelque chose. Mais en fin de compte, cela risque surtout de profiter à Le Pen.